Sous ce titre, dans l'édition du Monde d'aujourd'hui, une très intéressante contribution de Rachid Azzouz, Mazarine Pingeot, Philippe-Gabriel Steg, Mohamed Ulad et Isabelle Wekstein, dont je retiens quelques extraits.
Après avoir évoqué des cas où la question du blasphème est au coeur de l'actualité (projection au sol de versets à Toulouse, demande de l'OCI de reconnaître le blasphème dans le droit international, revalorisation de la prime contre Rushdie) ...
(...) Il apparaît clairement que, derrière le blasphème, c'est la liberté religieuse qui est en jeu.
Ce qui se joue au travers de ces phénomènes simultanés est une double guerre. La première est une guerre menée au sein du monde arabo-musulman par des minorités financées par les forces les plus rétrogrades de l'islam wahhabite et chiite pour imposer par la force des dictatures théocratiques islamistes à une majorité souvent indifférente et une minorité démocrate mais apeurée. La seconde est une guerre d'intimidation menée par les mêmes contre l'Occident et sa liberté de pensée et d'expression, guerre qui se joue ici.
Dans ce double conflit, toute politique d'apaisement ou de compromis avec le terrorisme, que ce soit celui de la pensée ou celui des bombes, n'est pas seulement une capitulation inutile, c'est un coup de poignard dans le dos des démocrates et des libéraux du monde arabo-musulman. (..)
Je voudrais réagir à leur
évocation de la majorité musulmane "démocrate mais apeurée". Ce dernier mot
est-il juste ? Intimidée certes, piégée - figure classique - entre la prise de
distance, qui lui vaut l'accusation d'être contre l'Islam de la part des extrémistes, et le silence - qui la rend
de fait complice et favorise dans la société l'amalgame et la peur de l'Islam, perçu en bloc.
Il est grand temps que les Musulmans modérés, démocrates, éclairés, normaux –peu
importe l’appellation : les héritiers de ce que des siècles d’Islam ont produit
de meilleur - s'expriment fort et clair sur quelques points cruciaux,
prennent nettement position. Et que les médias relaient haut et fort cette expression.
Au moins trois points.
D'abord, une nation ou communauté n'est pas responsable des agissements d'un de
ses membres, ou d'une minorité en son sein. Les Musulmans en sont victimes,
mais les réactions à "L'innocence...." procèdent de cette même
attitude.
Ensuite, la loi ne saurait considérer comme crime ou délit un fait de
nature religieuse (blasphème, apostasie, ...). Avancée de la Révolution, le
combat d'idées se mène par les idées.
Enfin, le sacré pour soi ne l'est pas
forcément pour les autres. On peut le regretter, mais on doit l'accepter.