J'emprunte ce graphique, très parlant, à un ami économiste. Il m'a incité à mettre par écrit une réflexion, je dirais un dilemme, que je ressasse depuis longtemps.
Se situer au niveau du Japon/Canada/Corée du Sud? |
A dire vrai, c'est une question, que je ne peux arriver à trancher,
J'ai toujours connu le système français, avec quasi pas de frais d'inscription, même si on a souvent hurlé aux augmentations qui étaient imposées progressivement. Excluons cependant les grandes écoles, celles qui sont non seulement gratuites mais où les étudiants sont rémunérés, et celles qui sont d'ores et déjà hors de prix (commerce, management, et bien d'autres). Autant dire que les enfants de familles modestes, même pas pauvres, s'en trouvent de fait exclus, et n'ont comme issue que la Fac.
Le système est beau, généreux, veut permettre à tous l'accès à des études supérieures.
C'est donc l'Etat qui finance l'essentiel du coût des études supérieures, qui subventionne indistinctement classes moyennes inférieures (et les revenus modestes bien entendu, pour lesquels il y a es bourses en plus) et enfants de foyers à hauts ou très hauts revenus. Qui subventionne indistinctement les étudiants étrangers qu'ils soient des jeunes valeureux, méritants, issus de familles modestes (mais ceux-là ont-ils seulement la possibilité de postuler, de voyager, de subvenir à leurs besoins sur place ?) ou qu'ils soient enfants d'élites fort riches, aux fortunes bien ou mal acquises. A tous, la République subventionne les études, indistinctement. Y compris à certains (minoritaires, mais réels) qui enfilent redoublements et changements de filières pour durer étudiants le plus longtemps possible.
Entendons-nous bien. J'accorde une importance primordiale au fait d'accueillir et de former des étudiants en France. Il en va de notre rayonnement, de notre avenir, si tant est que les liens noués pendant les études façonnent les individus qui vont s'en trouver imprégnés tout au long de leur vie, dans l'exercice de leurs responsabilités. Je ne décolère pas que les comptables de Bercy aient au fil des années imposé des restrictions de toutes sortes au prétexte (réel) qu'on subventionnait largement et à l'aveuglette, mais avec la conséquence de tarir (définitivement ?) l'afflux des étudiants étrangers, et en particulier des meilleurs.
Car la quasi gratuité des frais de scolarité est-elle attractive ? Largement pas. Je me désespère de connaître de plus en plus de jeunes Africains - même francophones - qui tournent leurs regards vers UK ou USA, malgré les coûts prohibitifs, et dédaignent désormais la France et l'Europe, ou seulement comme pis aller, si on ne peut faire autrement. C'est justement le coût qui attire ? En tout cas c'est l'ambition des meilleurs. Et ces destinations préférées savent les attirer, avec des bourses, des "grants", et toutes sortes de financement, tout en prenant l'argent des enfants de riches qui ont les moyens de payer les "fees", et retourneront reproduire les élites dont les parents participent. Banco ! Il ne faut pas s'étonner si on construit ainsi notre déclin, notre perte d'influence, à ne pas savoir capter les talents. Tout faux !
Que faire alors ? La solution serait-elle de demander des frais de scolarité correspondant aux coûts réel ou à peu près, à tout le monde (et pas seulement aux étrangers, comme cela a été tenté) ? Ceci s'accompagnant, au denier près, de bourses pour couvrir ces frais supplémentaires, en totalité ou partiellement, en fonction du niveau de revenu des parents, sur la base par exemple du revenu imposable. Et pour les étrangers (ce serait bien entendu beaucoup plus compliqué) multiplier les bourses, sur la base du mérite si on ne peut évaluer la capacité familiale à financer.
Je comprends que cela décoiffe. Et je suis moi-même très hésitant, car on sait la capacité des Finances à progressivement réduire ce type de dépense budgétaire, à en faire une variable d'ajustement, jusqu'à perdre le sens de la mesure. surtout si la volonté politique n'est plus là. C'est un peu la quadrature du cercle, n'empêche que la situation actuelle n'est pas satisfaisante.