mardi 10 février 2015

LA GAUCHE NE DOIT PLUS ABANDONNER LA LAICITE

Je me suis permis de commenter certaines parties du texte d’une motion thématique ainsi intitulée, présentée en vue du Congrès du Parti Socialiste (voir les lignes en majuscules dans le texte en question, plus bas).

Les intentions sont bonnes, mais au fond cela procède non d'une offensive qui développerait et renforcerait la laïcité vécue au quotidien, mais d'un repli sur soi, de facto communautaire, qui ouvre la porte mais le martinet à la main.

A l'instar de la GdG, de Marianchon et al., des preux chevaliers de la Laïcarde, il y a un désir d'antan, de bouffages de curés, de hussards de la République. Dérisoire, sans avenir, surtout contre-productif. Comme le souverainisme etc. Reishoffen !!!! C'est se tromper de guerre, de monde.

Mais une autre erreur, de fond là aussi.
En 1905, la République devait s'imposer à l'Eglise, enracinée, influente,dominante idéologiquement dans bien des régions, politiquement revancharde. Elle a fait des compromis et y est arrivée.
Aujourd'hui, la République peine à trouver le bon modus vivendi avec une partie de ses citoyens qui mettent en avant désormais des aspects identitaires longtemps refoulés, et qu'ils veulent pouvoir vivre en étant eux-mêmes au sein de la République. Cela pose quelques problèmes, mais mérite d'être résolu, car ils sont sous la pressions de forces terribles qui leur suggèrent que ce n'est pas possible, qu'il y a incompatibilité entre la laïcité et leur foi, et qu'il faut choisir (Dieu bien entendu). 
La situation est toute inverse. L'enjeu est : saura-t-on accueillir ? et non: comment se protéger. Il faut LES protéger, en leur donnant le sentiment d'être accueillis. Ce qui n'exclut en rien la FERMETÉ, si les uns et les autres ont l'ouverture nécessaire pour faire la part de l'essentiel, de l'inacceptable, de l'inhabituel mais compatible. Cela n'implique pas une négociation communautaire, d'ailleurs (pas d'Edit de Nantes!!!!) , mais de la discussion, des prises de décisions bien mesurées, de la concertation, dans la durée, un processus dans la durée, qui privilégie le consensus, qui identifie aussi les interlocuteurs: entre Républicains (il ne s’agit pas d’accommoder mais au contraire de neutraliser les intégristes de tout poils – qu’ils portent turban, kippa ou rosaire).
De même que tout racisme est condamnable, il faut traiter différemment le racisme du fort à l’opprimé, et celui du soumis au dominateur. De même, aller chercher aujourd’hui les recettes et réflexes des combats laïques contre l’Eglise du début XXème, c’est peut-être se faire plaisir, mais c’est se tromper de combat, de cible, d’armement.
Lien avec le texte de la contribution, reproduit en partie et commenté ci-dessous http://congres.parti-socialiste.fr/contributions/la-gauche-ne-doit-plus-abandonner-la-laicite 
La gauche n’est pas exempte de responsabilités. Trop souvent, faute de garantir l’égalité républicaine, elle a cédé à la tentation différentialiste : faute d’offrir à chaque citoyen l’accès à l’Ecole, au logement, à l’emploi, à la vie politique,  elle a laissé chacun se replier sur sa communauté d’origine, sur son quartier, sa religion. la véritable articulation entre tout cela est confuse. le recours à un reflexe communautaire – souvent tres present dans la culture d’origine alors que la notion de citoyenneté est totalement à acquérir, « non-naturelle » pour les nouveaux venus – prospere sur la carence de solutions citoyennes, accessibles et superieures. , On sent, aujourd’hui, plus que jamais, le risque de céder à un multiculturalisme soi-disant « tempéré », qui acterait notre renoncement collectif à être des égaux, pour orienter notre pays vers le modèle anglo-saxon. des termes fourre-tout, qui servent davantage d’epouvantails qu’ils n’affinent l’analyse – et donc empechent, derriere, de tracer des limites pertinentes et solides, sur lesquelles se battre. Ou autorisent ensuite des raccourcis néfastes. Nous refusons cette capitulation.
Nous refusons tout autant le dévoiement de la laïcité en arme d’intolérance et de stigmatisation. Assez des aigreurs zemmouriennes et des fantasmes de « grand remplacement » ! La droite et l’extrême-droite ont abîmé la laïcité, en la prenant pour prétexte à leur obsession identitaire. La manipulation de la laïcité par Nicolas Sarkozy, Chanoine de Latran, qui a le premier parlé de « préfet musulman » et de discrimination positive, est une tartufferie. Tout comme l’est le mensonge sinistre de Marine Le Pen qui, entourée d’intégristes et de racistes, trahit la laïcité lorsqu’elle multiplie les diatribes anti-musulmans ou conteste aux femmes le droit de disposer de leur corps. La République doit se réapproprier le feu de la laïcité qui lui a été volé par ces usurpateurs. Et c’est à la gauche de porter ce flambeau, comme elle l’a fait historiquement.
Pour cela, nous souhaitons que la gauche, et en particulier les Socialistes, réaffirment plusieurs principes fondamentaux.
Avant tout, le PS doit recréer de la fierté laïque, réaffirmer que la laïcité est l’autre nom du bonheur français. Elle est partagée par l’écrasante majorité des citoyens, qui au quotidien vivent, travaillent, se marient ensemble dans une intégration presque unique au monde. La laïcité est le pilier central de cette fraternité et de cette tolérance : le rôle de la laïcité n’est pas d’exacerber les différences ni de les nier, mais de créer l’espace où elles se conjuguent. Surtout, le camp laïc, ce sont 65 millions de Français qui, chaque jour dans leur diversité de conscience, cultivent la paix civile et n’ont pas à subir les pressions ni encore moins les violences de quelques intégristes de toutes obédiences. Ces paroles sont belles et justes. Pleinement. Reste à les faire vivre. Par exemple des jeunes filles ou femmes, qui veulent s’épanouir et n’acceptent pas pressions ni violences, portant un voile qu’elles estiment nécessaire à leur pudeur, viennent militer pour ces valeurs. Bienvenues ou malaise ? La tonalité générale du texte sème le doute sur l’ouverture et l’accueil. A sa lecture, je doute qu’elles rejoignent. Problème, non ? Nous, pratiquants (SIC) de la laïcité venus de tous horizons, sommes la majorité sociale de la France, cela doit suffire à imposer le respect à ceux qui prétendent la mettre en cause. Ne nous laissons plus faire par ceux qui veulent nous diviser !
Il n’y a pas, dans notre pays, de guerre de civilisations qui opposerait les religions, une en particulier l’Islam, à la démocratie. Il y a une lutte, totale, où se confrontent la République et les extrémistes qui veulent sa chute.
Pour préserver notre bonheur collectif, il faut assumer la fermeté laïque. Etre fermes, cela signifie condamner toute exaction commise contre les croyants mais aussi au nom des religions. C’est refuser la poussée des revendications communautaires, dans les services publics mais aussi dans les entreprises ou l’espace public. C’est en finir avec les petits accommodements politiciens qui visent à financer de façon détournée les lieux de cultes ou les établissements scolaires. OK, mais alors on fait quoi ? Les lieux de culte sont insuffisants faute de presence historique de l’islam. les fidèles, tres largement issus des couches (les plus) modestes ne peuvent y pourvoir. la liberte de culte, c’est aussi trouver une solution a l’impossibilite observée de pratiquer . Financement étranger ? c’est pire que le mal, car ce ne sont pas les candidats au financement qui manquent, ce sont les conditions ideologiques qui vont avec – et qui constituent le vrai danger, ce qui est justement dénoncé plus haut. Donc ici on va vite en besogne, on jette le bébé avec l’eau du bain. bien sur il y a eu des negligences et du coulage, et un manque de suivi. Remettre à plat des pratiques, pas procéder par oukazes dogmatiques. C’est refuser que certains de nos concitoyens s’enferment (1), ou soient enfermés malgré eux (2) , dans des « communautés », réduits à leur pratique religieuse, mis en demeure d’être des religieux « modérés » (3) au lieu d’être simplement considérés comme des français. collision de realités fort différentes, amalgamées ici du seul fait qu’elles sont frappées de rejet. Pour (1), qu’on m’explique comment on peut refuser a quiconque telle ou telle pratique de vie, dès lors qu’il se conforme aux lois. la démarche doit être inverse, a savoir que quiconque doit se voir offrir la possibilité de ne pas s’enfermer s’il ne le souhaite pas (on retrouve ici la proposition (2)), et de se voir protége dans ce choix. La nuance n’est pas mince !! Mais (2), suppose autre chose. La contrainte.Implicitement, de la communauté sous toutes ses modalités – famille, entourage, traditions, etc. Là encore, il ne s’agit pas de « refuser » mais d’aider au non-enfermement, créer les conditions aux individus qui leur permettent de vivre selon leur liberté. Mais la rhétoriqueimplicite de la phrase est autre, Elle insinue fortement qu’il n’y aurait d’attitude  communautaire que « malgré soi », forcée, imposée de l’extérieur à des esprits dominés. (1) n’est que faux-semblant de (2). C’est porter un jugement moral sur des millions d’individus, des milliards de par le monde .C’est amalgamer le niveau du politique (OUI, la République ne connaît que les citoyens), et celui de la vie personnelle et de la liberté qui y est attachée.Quant à (3), ça n’a rien à voir, c’est là pour faire joli, on l’a entendu dire sans avoir bien compris, ça fait fausse fenêtre. On me montrera le fondement du rapport.   C’est refuser le déferlement des propos racistes qui les visent actuellement.
La fermeté laïque c’est surtout affirmer que la laïcité n’est pas une opinion parmi d’autres mais le lieu où peut s’épanouir une totale liberté de conscience : les textes fondamentaux de notre pays garantissent autant le droit de croire que de ne pas croire. Il faut dire sans frémir : dans la République, on peut tout aussi librement pratiquer les religions que les critiquer.
Enfin, le Parti socialiste doit porter une nouvelle ambition laïque, en particulier pour l’Ecole. Lorsque la laïcité est attaquée, l’Ecole doit plus que jamais être la première priorité de la République. De nombreuses initiatives ont été prises depuis 2012 par le Gouvernement et méritent d’être saluées. Mais la situation est grave comme en témoignent les nombreux incidents dans les établissements au moment du drame de Charlie Hebdo, et plus massivement encore les 150 000 décrocheurs rejetés par le système chaque année. L’inégalité scolaire frappe si largement et si durement nos enfants qu’elle transcende les questions de religion, d’origine ethnique, de zones urbaines ou rurales. L’Ecole ne peut régler tous les problèmes de la société, a fortiori si la société ne règle pas les problèmes de l’Ecole. C’est autour de sa refondation que doit se faire l’unité nationale.
Face à la situation de notre pays, nous demandons un « plan d’urgence laïque », dont les premières propositions sont :
1- Commander un audit national sur l’ensemble des financements publics en faveur des cultes, et y mettre un terme, y compris lorsque ces activités sont présentées comme « culturelles » La cause est donc entendue, sans nuance. On voit clairement les conséquences, et qui va étré affecté. Si c’est pas claquer la porte – campé certes sur le grand cheval des principes, et au nom de l’égalité -à une partie des citoyens, qu’on me le démontre
2- Revenir sur la loi Carle de 2009 obligeant les communes à financer la scolarité des élèves dans les établissements privés confessionnels situés dans d’autres communes (Art. L.442-5-1 et L.442-5-2 du code de l’éducation).
3- Permettre, par la loi, aux entreprises et structures de droit privé de faire respecter la neutralité religieuse en leur sein
4- Donner un temps d’antenne sur les chaînes publiques de télévision aux mouvements philosophiques non- confessionnels  Au passage, qui pour porter cette parole ? Réprésentatif de qui ? Mandaté par qui ?
5- Demander aux élus de ne plus s’exprimer, es qualités, lors des offices religieux auxquels ils sont amenés à participer.
6- Faire entrer l’ensemble des territoires de la République, y compris l’Alsace-Moselle et les outre-mers, dans le champ d’application de la loi de 1905, et supprimer dès avant cela le délit de blasphème.
Pas de plus grande urgence !! Voilà qui promet de belles batailles, un beau merdier, des hostilités là où tout est calme. Il y a eu un procès pour blasphème récemment ? Quelqu’un pour soulever la question ? Ceux qui s’y sont risqué s’y sont brûlé les doigts et n’y reviendront pas de sitôt ! Trop Français, cette volonté d’uniformiser quand aucun réel péril d’actualité n’y contraint.
7- Tenir l’engagement présidentiel n°46 en intégrant la loi de 1905 dans la Constitution

Louis Pasteur écrivait : « Ce sont les Grecs qui nous ont légué le plus beau mot de notre langue: le mot «enthousiasme» - du grec en-theo, Dieu intérieur. » Nous voulons que la gauche porte, pour la France, un nouvel enthousiasme laïque. On avait bien senti dans le texte (voir notamment le 4 ci-dessus, ou « pratiquants de la laïcité » plus haut) que la laicite est ici érigée en dogme concurrent, à l’instar des religions – ce que la loi de 1905 ne fait pas.

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