dimanche 14 juin 2015

Mon 6ème sens(phone)

Mais allô quoi ? ODE.

Tout a commencé avec la perte du fil, le cordon coupé. Pas une commodité, une révolution copernicienne.

Bonjour de Haïti
Jusque là, le téléphone était lié à un lieu. On vous appelle, on vous y trouve, ou pas. Non il n’est pas là, je peux lui faire une commission ? Avantage : hors d’atteinte, on ne peut pas vous emmerder avec des questions de boulot. Mais on peut aussi vérifier que vous êtes là. Ou tout le monde peut décrocher. C‘était qui, cette voix féminine qui a subitement raccroché ? Vaudeville.

Le mobile est lié à une personne. Çà change tout. Vous êtes accessible 24/7, suspect si vous ne décrochez pas. L’absence de réseau n’est plus un bon prétexte. Mais on ne sait pas d’où vous répondez, sauf à mettre bêtement la cam. Oui, oui, tout de suite Monsieur le Directeur, dis-je voluptueusement allongé. Mais ça, c’était l’antiquité, le vieux Nokia.

Avec les smartphones (j’ai pas trouvé mieux en français), c’est autre chose. Je peux être, à tout moment, en contact avec ma fille, mes amis, à des milliers de kilomètres. Plus proches, bien plus, que des copains à quelques rues, que finalement je ne rencontre qu’épisodiquement. Des rencontres, justement. J’en fais non plus seulement où mes pas me guident, mais sur des réseaux à l’infini. Extension du domaine des contacts. Je peux voir, entendre, à la seconde, ce qui se passe partout ailleurs, par le truchement de TVs ou d’un témoin sur place, tout en déambulant dans mon petit périmètre. Je me trimbale, partout, avec bien plus de dictionnaires que je n‘en ai jamais eu, d’infinies bibliothèques, discothèques, médiathèques, mes œuvres préférées, ou que je n’aurais pas eu la chance de découvrir. Pour le meilleur et pour le pire ? Bien entendu, comme tout, depuis Esope.

Jusque là j’avais ma vue, mon ouïe, mon odorat, mon toucher, mon goût, que j’ai dû éduquer ; je m’habitue à jouir d’un sixième sens, l’ubiquité.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire